Vivre sur un gisement de lait et… mourir de faim !

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Nos enfants souffrent de manière endémique de malnutrition. Nous consacrons chaque année un budget toujours plus important à l’importation de produits laitiers. Et pourtant notre imposant cheptel regorge de lait encore inexploité. Alors quand l’Etat va-t-il enfin s’engager dans l’émergence d’une industrie laitière à la hauteur de notre potentiel animalier susceptible non seulement de répondre à notre besoin mais aussi d’aller à la conquête du marché international ?


 FCFA 9 milliards ! C’est les importations du Niger en produits laitiers pour l’année 2005. Et la tendance pour cet indicateur est à la hausse. Parmi les principaux importateurs, notre industrie laitière qui peine à trouver les quantités nécessaires à sa production. Pourtant le pays compte environ 31 millions de têtes de bétail. Selon le Recensement Général du Cheptel 2007, près de 88% des éleveurs pratiquent la traite sur les bovins, 59% sur les camélidés, 50% sur les caprins et seulement 24% sur les ovins. Certains éleveurs, faute de pouvoir conserver le lait, se retrouvent à l’utiliser pour alimenter le reste du bétail ou à le déverser par terre. Les femmes d’éleveurs en périphérie des zones sédentaires essayent d’écouler leurs produits sur les marchés ruraux. Elles marchent des kilomètres, la calebasse de lait sur la tête. Connaissant les difficultés de conservation du lait, on imagine aisément que le revenu tiré de cette activité de petite échelle n’est pas à la hauteur des efforts déployés pour perpétuer ces pratiques rudimentaires d’exploitation des produits laitiers. Pire encore, ces pratiques peuvent constituer un danger pour la santé publique, l’environnement chaud et les conditions d’hygiène entraînant un pourrissement rapide du lait. Autant dire du gâchis. Ce gaspillage d’une ressource prisée et hautement nourrissante est d’autant plus criant que près de 40% des enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition caractérisée par une insuffisance pondérale modérée et grave (UNICEF données 1995-2003). C’est dire que nos enfants souffrent de malnutrition et meurent de faim comme des mouches alors qu’il nous suffit de mieux structurer la collecte, la conservation et la transformation de notre gisement de lait. Certains me diraient ‘facile à dire mais pas à faire !’. Effectivement si c’était facile, pourquoi l’industrie de lait supporterait les coûts de fret et les taxes à l’importation pour se ravitailler en lait ? On pourrait leur reprocher en tant qu’acteurs privés, le peu d’investissement fait dans le sens du développement de la collecte de lait sur le territoire national et peut-être le peu d’ambition en termes de volumes et de conquête de marchés extérieurs pouvant rentabiliser cet investissement. Mais encore faut-il qu’ils aient la taille suffisante et que les producteurs de lait soient capables de les fournir en quantité et en qualité. Non, le gros fautif reste l’Etat ! Bien qu’il y ait eu un programme national de développement laitier depuis 2002, nos vaches continuent d’avoir les pis gorgés de lait tandis que nos enfants souffrent de malnutrition et que nous dépensons des milliards pour en acheter dehors. Et pourtant il a gros à y gagner l’Etat Nigérien. En rehaussant la consommation de lait au niveau national c’est moins de dépenses de santé avec des enfants en meilleur santé et plus à même d’apprendre. C’est des travailleurs en bien meilleure forme. Mais en outre, le lait est un produit dont le Niger peut tirer un avantage comparatif sur la scène internationale et particulièrement en Afrique. Comme le Niger, beaucoup de nos voisins sont importateurs de produits laitiers. Le Sénégal a importé en 2007 pour près de FCFA 58 milliards de produits laitiers dont 32 milliards pour le lait en poudre soit 24 000 tonnes d’équivalent lait. Le Cameroun a lui importé la même année pour 23 771 tonnes soit FCFA 30,5 milliards. Pour le Nigeria, pour le seul second trimestre 2007, Naira 12,7 milliards sont ainsi partis! Autant de débouchés probables pour nos produits laitiers. Autant de rentrées d’argent pour nos entreprises et l’Etat. Alors quand l’Etat va-t-il se décider à promouvoir des coopératives laitières et à les subventionner pour qu’elles puissent mettr en place des pratiques efficaces de production de lait ? Quand l’Etat va-t-il encourager et accompagner les privés à investir dans la filière de collecte et de distribution de lait ? Quand l’Etat va-t-il encourager et accompagner l’émergence de géants laitiers nigériens à l’image de Danone en France ? Nous avons les ressources humaines et animales d’une telle ambition. La rentabilité d’un tel projet est difficilement discutable. Le reste viendra de notre engagement et de notre approche dans la réalisation de cette ambition.

Commentaires

Rédaction d'un article sur CriDeCigogne.org

Bonjour,

Salamatou, l'idée d'un article documentée sur le sujet est très pertinente et nous vous encourageons vivement à la concrétiser afin de contribuer à la formation de tous ceux qui s'intéressent à cette filière et à entretenir la mobilisation pour le développement du Niger.

Pour soumettre un article, c'est très simple : il suffit de compléter ce formulaire.

Notre équipe est également à votre disposition pour toute autre question ou demande de renseignement à travers notre formulaire de contact général.

À très bientôt.

Rédaction d'un article

Je suis d'accord pour faire un article sur une structuration de filière reussie dans un autre pays d'Afrique. J'y joindrai aussi des propositions qui ne sont que des répétitions de nos imminents spécialistes de la question laitière au Niger. Quelles sont les modalités pour introduire l'article sur votre site?

J'espère que cet article permettra à tous ceux qui s'interressent au developpement agricole durable du Niger d'avoir:

- une vision long terme des stratégies proposées.

- être convaincu du bien-fondé des démarches

- et prêt à s'investir en toute sincérité.

J'insiste sur le mot "sincérité" car je suis convaincue qu'il est à l'origine de tous les maux du Niger, de l'Afrique et de toute l'Humanité. Mon opinion est discutable, je le concède. 

A bientot

Re: Filière locale lait du Niger

Bonjour Salamatou. Merci tout d'abord d'avoir pris le temps de poster un commentaire très instructif.

Pour revenir à la filière lait, comme dit dans l'article au plan national, il existe un Plan de Développement Laitier. Mais il y'a un gouffre entre les textes et la réalité. Une des raisons qui explique ce décalage c'est que les plans et les textes sont en général faits pour obtenir les financements extérieurs donc pas d'appropriation au niveau local et au niveau des différents acteurs nationaux. Une approche constructive aurait déjà susciter l'organisation de certaines communautés périphériques des centres urbains en points de collecte de lait. Et cela peut être mis en place tant sous l'impulsion de l'Etat que sur initiative privée des industriels ou même des communautés locales elles-mêmes.

 

Je suis très intrigué par tes reflexions sur la structuration des filiaires locales africaines. Je te propose de soumettre un article qui décrirait un exemple d'organisation de filiaire laitière de bout en bout et qui pourrait marcher au Niger. Qu'en dis-tu?

Merci

Filières locales du Niger

Bonjour,

La question de la filière laitière au Niger fait partie de mes reflexions actuelles. En effet, je me documente énormément sur les stratégies possibles à adopter au Niger pour promouvoir la filière laitière locale.

Il y eu beaucoup de progrès à l'échelle régionale (CEDEAO) notamment par la mise en place d'un document cadre ECOWAP permettant de placer l'agriculture au coeur des préoccupations politiques. J'étais étonnée de découvrir l'adhésion du Niger à plusieurs réseaux et partenaires pour le développement des filières locales. Ce qui m'amène à me poser la question suivante: pourquoi malgré tous ces appuis, les filières ne sont pas valorisés au maximum?

Je pense que la réponse est simple. Nos dirigeants ne font pas un management sérieux. Je ne parle pas de l'Etat uniquement mais de tout directeur ou gestionnaire d'entreprise qui ne se projette pas dans l'avenir. Dès la nomination, on commence à réfléchir à un moyen de piquer l'argent des caisses.

Je pense qu'il faut une véritable prise de conscience de nos dirigeants politiques et d'entreprises car c'est à eux que reviens la responsabilité de réflechir et d'appliquer avec rigueur et conviction des stratégies de développement à long termes.

Je suis optimiste pour le Niger car tout ce qui manque ce sont des cadres fortement impliqués. LE système Coopératif reste le seul modèle économique permettant d'impliquer fortement les paysans par une rénumération plus juste de leurs produits. Aussi faut-il trouver des animateurs assez convaincants pour les organiser en plate-forme d'approvisionnement?

Le chemin est long et sinieux avant qu'une organisation paysanne soit suffisamment forte pour faire du lobbying, tout comme les industriels. Il faut simplement y croire.

Je suis ouverte aux débats et notamment sur la structutration des filières locales africaines.

A bientot

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