La corruption au Niger : obstacle majeur au développement

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Panneau de sensibilisation contre la corruption à NiameyLe Niger est l'un des pays les plus pauvres du monde et la paupérisation s'est accentuée au fil des années malgré la multitude de projets financés afin d'améliorer la situation. Les conditions de vie de la population continueront certainement à se dégrader tant qu'il n'y aura pas une gestion sérieuse et rigoureuse des deniers publics et notamment tant que la gestion resterait toujours entachée par la corruption.

L’abus du pouvoir public (car c’est de cette catégorie de corruption dont il s’agira dans cette article) à des fins personnelles est un des obstacles majeurs au développement.

 

 

Un fléau terrible qui se banalise...


 

Pour financer des projets dans le cadre de l'amélioration des conditions de vie de sa population (infrastructures, éducation, santé, accès à l'eau potable,...), le Niger, comme la majorité des pays pauvres, fait appel à des bailleurs de fonds afin de contracter un prêt, qui engagera aussi bien les générations actuelles que futures. Il est tout simplement difficile pour une génération de comprendre qu’en dépit d'une extrême pauvreté dans laquelle elle a vu le jour et vit, elle doit porter la lourde tâche de rembourser des dettes. Cela est d’autant plus incompréhensible que cette dette ne sert en réalité qu’à une certaine catégorie de personnes.

Certes, nombreux sont les pays qui ont contracté des dettes dont des parties sont remboursées par les générations futures, sauf qu’ailleurs, ces dernières voient le jour dans des conditions meilleures que celles qui les ont précédées (accès aux soins, éducation, alimentation, transports,...). Le problème majeur reste "la bonne" utilisation des fonds empruntés. Dans certains cas (bonne gouvernance) la population bénéficie des effets d’une bonne gestion et dans d’autres elle subit les effets d’une gestion désastreuse.

La corruption dans la gestion des de affaires publiques est certainement un énorme frein à tout processus de développement. Pots de vin, dessous de tables, népotisme,… Tels sont les maux qui entachent la gestion dans des pays comme le Niger.

Prenons l’exemple d’un projet programme de construction immobilière quelconque sur le budget de l’Etat. Le programme, sera sous la direction d’un premier responsable chargé de  sélectionner une entreprise et d’un deuxième agent (indépendant du premier) pour le contrôle des réalisations. Pour un budget déjà très restreint de 5 millions par exemple, le premier responsable, en dépit de son salaire peut réclamer 10 à 15% de pot de vin à l'entreprise qui veut être sélectionnée.

On se rend tout de suite compte que dans ce cas,  la compétence n'est pas forcement au rendez-vous. Nous avons déjà une première réduction du budget destiné au programme qui passe de 5 millions à 4,5 millions (voire 4,25 millions), car les pots de vin sont pompés plus ou moins directement dans les fonds publics. L’entreprise, en tenant compte des bénéfices qu'elle doit réaliser commence déjà à avoir du mal à respecter les prescriptions techniques du projet.

Alors le plus simple c'est de « fermer les yeux » au contrôleur en lui offrant un pourcentage, donc deuxième diminution du budget ; ce qui conduit logiquement à une réalisation catastrophique du projet. Voilà qu’à travers trois intervenants la population paye le prix d'avoir donné toute sa confiance aux responsables garants de ses projets d'avenir.

Un des points communs entre l'intensification de l'agriculture au Burkina Faso et au Maroc et le fameux programme spécial, c’est la réalisation de mini-barrages. Principal point de divergence : amélioration des productions agricoles chez les autres et des barrages qui cèdent au Niger. Beaucoup de projets mais d'importants flous dans l'attribution et le suivi des projets.

Nous pouvons citer l’exemple du mini – barrage de Séti dans la commune de Birni N’Gaouré d’une capacité de 600 000m3 pour une superficie de 21 hectares. Cet ouvrage à vocation agro-pastorale réalisé en 2009 voit une de ses parties rompre aux premières fortes précipitations alors que ce mini – barrage sensé tenir face à la plus grande crue connue dans la région a coûté 197 millions de FCA au contribuable1.

Il est sûr que les secteurs sont nombreux à être touchés par la corruption (pour ne pas dire tous). Ainsi, un rapport de l’AFD2 (Agence Française de Développement) indique qu’en octobre 2005, les PTF (Partenaires Techniques et Financiers) ont décidé de suspendre le décaissement de nouvelles tranches de financement à compter de 2006 dans le cadre d’aide au secteur de l’éducation au Niger. Un cabinet burkinabé a été engagé pour un audit sur la tranche des quatre milliards décaissés auparavant. Il a été signalé des irrégularités dans les passations de marchés, des surfacturations, sans oublier les dépenses injustifiées. La  population est une fois encore sanctionnée pour une gestion douteuse de la part de certains de nos concitoyens.

Les problèmes évoqués ci-dessus font cas de la « grande » corruption généralisée au Niger et la liste n’est pas exhaustive.

La  corruption à petite échelle est aussi devenue omniprésente dans tous les secteurs ou services (éducation, permis de conduire, police, administration publique et privée …). Actuellement au Niger, il commence à devenir plus normal de corrompre que de ne pas le faire. Le contribuable oublie complètement qu’il cotise ou l’Etat s’endette en son nom pour que le salaire de l’employé qui réclame d’être corrompu soit garanti. La réclamation de frais supplémentaires par des agents  du service  public est telle que l’on se demande si ce ne sont pas des cabinets privés qui sont installés dans les locaux de l’administration publique.

La situation est fortement étonnante ! Au Niger, il est possible de rencontrer des fonctionnaires milliardaires. Même avec 500.000 FCFA de salaire net (salaire plutôt luxueux au Niger), il faudrait un peu plus de 166 ans d'économies sans toucher bien entendu à rien de son salaire pour atteindre le milliard de CFA. Pas de doute donc, dans ces cas, qu’il s’agit de richesses illégalement acquises. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’on assiste à une gigantesque foire au laisser aller et que  la moralité a perdu tout son sens dans la gestion des fonds publics au Niger.

On peut avoir le projet le plus ambitieux du monde, le plus adapté aux réalités dans lesquelles vivent les populations, tant qu'il n'y a pas de volonté de gestion efficace et honnête, ce dernier ressemblera à vouloir construire sur un sable mouvant .Tant que le problème de la corruption ne sera pas réglé, avec malgré les meilleures richesses, les meilleurs projets du monde, la population va toujours hélas végéter dans la misère. L’une des grandes richesses qu’un pays puisse avoir, c’est de ne pas être victime de la corruption.

Dans le rapport 2009 de Transparency International (TI)3, sans surprise, les pays où les conditions de vie des populations sont parmi les meilleures du monde (Nouvelle-Zélande, Danemark, Singapour, Suède, Suisse,…) sont les moins entachés par la corruption.

 

Comment combattre la corruption ?


 

Le problème de la corruption au Niger est très complexe. Le pot de vin commence à devenir légitime dans la conscience de la population. Cela reste un fléau à combattre si toutefois nous voulons commencer à voir un peu clair dans nos conditions de vie.

Comment? Là est la vraie question! C'est pour cela d'ailleurs que je lance ce débat concernant la corruption, pas pour que cela fasse objet de lamentations, mais plutôt afin que nous proposions des pistes de sortie de ce cauchemar. Les marges de manœuvre du Niger sur le plan financier sont tellement restreintes qu’on ne peut que se permettre une gestion optimale des fonds publics.

Il est certain que le moyen le plus efficace de lutte contre la corruption reste la volonté politique. C’est le cas des pays (bons exemples) cités par TI où l’exemple vient des décideurs.  Qu’en est-il lorsque les politiques aussi baignent et semblent se complaire dans ce système ? Tant de structures au Niger changées, restructurées, renommées dans le cadre de lutte contre la corruption ou le détournement de biens publics (commission crimes et abus, ANLC : Association Nigérienne de Lutte Contre la corruption, que sais-je encore) mais quel est le résultat aujourd’hui ? Qu’est ce qui ne fonctionne pas ? Leurs méthodes sont-elles adaptées aux réalités Nigériennes ?

Une réalité non négligeable : le bas niveau des salaires au Niger. En effet, pendant longtemps, les salaires n’ont pas suivi la hausse du coût de la vie. La tentation est certainement forte face à la corruption lorsque  les salaires restent très limités par rapport aux dépenses. Je suis convaincu qu’avec les manques à gagner de l’Etat, passés à travers les mailles de la corruption, il sera possible au Niger de rehausser les salaires et même de réaliser des économies. Est-ce qu’il n’est pas temps que l’Etat Nigérien, en tirant toutes les conséquences, ait en même temps autant d’audace pour rehausser considérablement les salaires et autant de fermeté pour imperméabiliser (à la corruption) le système de gestion des fonds ?

La société civile et la justice ont certainement un grand rôle à jouer dans la lutte contre la corruption :

« toutefois, il est peu probable que même les mesures les mieux adaptées donnent des résultats si les institutions démocratiques de base, qu'il s'agisse de l'appareil judiciaire ou de la société civile, ne sont pas en place. Ces institutions doivent exister non seulement sur le papier, mais aussi avoir de véritables pouvoirs pour surveiller les pouvoirs publics et leur faire rendre des comptes » a fait remarquer M. Christian Poortman4 de Transparency International. Des réformes fondées sur ce principe ont été couronnées de succès à Singapour ou au Pérou par exemple. Cela revient toujours au politique : il faut un coup de pousse politique donnant les moyens à la justice d’être indépendante. Dans ce cadre, le gouvernement Péruvien a mis en place un dispositif spécial chargé d'enquêter et de poursuivre en justice les personnes accusées de corruption.

L’espoir au Niger, c’est qu’on a une société civile de plus en plus influente, faut-il encore qu’elle soit indépendante de tout penchant politique. Toutes les associations de la société civile peuvent se fédérer avec l’ANLC. Cette fédération peut avoir une influence très forte dans le cadre de la lutte contre la corruption en organisant des débats et en diffusant des documentaires sur le thème sur les médias. En invitant au débat de personnalités concernées par le problème (responsables des services impliqués), on peut leur faire prendre des engagements de coopérer (à l’avenir) avec la fédération en question dans la lutte contre la corruption en toute transparence. Cette alternative pourrait constituer un moyen de pression dans le cadre de l’éradication de la corruption.

Ces points de réflexion ne sont que quelques uns  parmi tant d'autres et je pense qu'il est important de mener une grande réflexion dans le cadre de la lutte contre la corruption au Niger car restant encore convaincu que lutter contre la corruption, c'est le début de l'amélioration de la qualité de vie d'une population.

Commentaires

Eradication de la corruption

Toutes vos propositions sont efficaces. Mais qui vont les appliquer? Les dirigeants, naturellement, allaez-vous me répondre.  Qui sont alors les grands corrupteurs et corrumpus. N'est pas eux? Avez-vu quelqu'un se faire punir ou punir les membres de sa famille ou de son clan surtout lorsque les effets du délit ou la concussion lui profitent.

On tourne toujours autour du pot et l'on tounera tant qu'on aurait pas un dirigeant digne de ce nom. Pour ce faire, il nous faut des dirgeants éclairés et désinteressés. Or à quoi nous assistons? Les princes qui nous gouvernent, au lieu de servir le peuple ne font que se servir.

IL nous faut des dirigeants de la trempe de Seyni Kouncthé, de Thomas Sankara ou de John Rawlings : des leaders qui vont occupé des charges de l'Etat et qui étaient repartis comme ils étaient venus. Leur peuples respectifs et le monde entier se rappellent d'eux pour avoir oeuvrer pour l'intérêt général de leurs peuples. Les deux premiers, bien que n'étant plus de monde depuis presque trois decennies, continuent d'être cités en exemple de part le monde. Au Niger, certains présidents, bien que vivants sont oubliés comme ayant été présidents tellement ils n'ont rien fait pour le Niger. Leurs seuls prouesses, ils se sont mieux lotis à coup des milliards volés au Niger et ailleurs dans le monde.

salam à tous

Comme vous le savez je suis partisan des solutions extrêmes. Pour lutter contre la corruption il n'ya pas quatres chemins. On devrait être en mésure de dissuader d'éventuels voleurs de propérer en rendant la sanction systématique:

1) Des qu'un cas de corruption est avéré, la punution doit être de 10 ans incompréssible pour un citoyen lambda et de 20 ans incompréssible pour les élus.

2) Pour les détournements de déniers publics, si les faits sont avérés. le coupable doit être condamné et déposseder de tout ses biens ou l'envoyer faire des travaux forcés jusqu'à remboursement du dernier tamma volé.

3) revaloriser le salaire des travailleurs nigeriens en élévant le SMIC à 100.000 cfa

4) Publier le salaire mensuel de tous les hauts fonctionnaires et des directeurs d'administration, des DG, du gouvernement et du président PR. Le salaire de ses derniers ne devant pas excéder 10 fois maximum le SMIC.

5) et pour finir éduquer nos gosses à l'école et dans les foyers.

finalement c'est pas si extremiste que ça... Ils y survivrons

lutte contre la corruption au Niger

bonjour

pour abonder dans le sens de Mr moctar il s`agira de :

1. que la presse se professionalise c`est a dire savoir investiguer avec des preuves a l`appui et que le procureur se saisisse de toute malversation publiee

2. mettre en place une ligne verte par le procureur ou chacun peut denoncer avec preuve a l`appui sans s`exposer. pour chaque denonciation le procureur delivrera un numero au denonceur qui pourra suivre au besoin le traitement reserve au dossier.en cas de lenteur deliberee il le refilera a la presse

3.mettre en place des agent secrets dument assermentes qui peuvent absolument avoir acces a tous les documents  de la presidence au simple vendeur de cacahuettece organe doit etre dirige pour un mandat determine par quelqu`un designe par consensus par les institutions de l`etat  et qui ne peut etre revoque qu`a la fin de son mandat.au sein de cet organe sera cree un comite d`ethique qui enterinera toute nomination promotion ou augmentation de salaire

4. mettre fin a l`impunite quelle qu`elle soit de la simple verification d`idendite du citoyen en passant par la police la gendarmerie larmee,la justice et ou toute personne susceptible d`abuser de son pouvoir

5. le grade minimum dans les corps de la police doit etre opj

6.relever le smig a 100.000 cfa et s`assurer que tous les impots soit collectes sous peine d`emprisonnement.

7.  enseigner la morale a l`ecole et parout.

8. privatiser tout ce qui peut l`etre

9.le niveau minimum de recrutement dans l`administration publique doit etre le bac

10.decentraliser a outrance et promouvoir les identites regionales.

merci

 

 

La corruption au Niger

Merci pour cette réflexion sur ce sujet si important pour une véritable amorce de développement durable en Afrique et au Niger en particulier. Les détails que vous évoquer sont très révélateurs du danger profond de ce phénomène qui gangrène nos administrations. Effectivement, vous le dites la corruption est entrain de devenir une logique fonctionnelle, oui malheureusement!

Outre la socièté civile, il faut aussi penser à une vraie liberté de la communication, une spécialisation de la presse au Niger. La presse doit couvrir tout les aspects de la vie du pays jusqu'aux citoyens individuellement pris même aux confins de leur vie privée. Une presse qui touche et qui fouine son nez partout, peut disuader les citoyens. Comment se peut-il qu'on fermer les yeux sur des trains de vies de certains citoyens alors qu'on sait très bien qu'une voie normale ne le permet pas? Au Niger, tu peux disposer de 100 villas, 1000 voitures de luxes, tu n'as pas besoin de justifer! 

J'insiste sur une presse libre qui parle sans tabous pour aller vers une socièté où chacun pense qu'il a sur lui l'oeil de l'autre. Aboutir à une socièté de surveillance réciproque, d'autosurveillance pour l'établissement d'un civisme dans un cadre de confiance réciproque qui n'exclut jamais le contrôle et la dénonciation.

Je vous remercie.

Mamoudou Moctar

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