Appel aux Nigériens, à la veille des élections...

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Drapeau du Niger

Le 31 janvier 2011, le peuple nigérien est appelé aux urnes, pour d’une part élire les membres du parlement et d’autre part choisir l’homme ou la femme qui, durant les cinq (5) années à venir, présidera aux destinées de notre pays, notre bien collectif le plus précieux.

Au regard de notre histoire récente et des derniers développements politiques, Cri de Cigogne juge utile de retracer les enjeux, rappeler les espoirs et prévenir des points qui nécessiteront une vigilance à propos de ces élections.

 

Le Conseil Suprême pour la Restauration de la Démocratie (CSRD), après son coup d’Etat du 18 février 2010,  s’est engagé à moraliser la vie politique, assainir la gestion des finances publiques et restaurer la démocratie au Niger. Une partie de la population nigérienne, la jeunesse notamment, souhaitait adjoindre aux missions du CSRD, le renouvellement de la classe politique. Pour les défenseurs de cette idée, la transition devait permettre de voir émerger de nouveaux leaders ; quitte selon certains d’entre eux, à disqualifier tous les anciens leaders politiques, ceux de la période post Conférence Nationale.

Des déceptions légitimes chez la jeunesse expliquent cette attitude. Nous avons émis des réserves à cette idée ici même, en relevant les dérives qu’elle peut susciter et en proposant des voies alternatives pour faire émerger le changement1. Nous nous sommes réjouis que cette idée ait été écartée, entre autres pour son infaisabilité juridique, mais surtout au nom de la réconciliation nationale.

 

Mais voilà que l’annonce, le mercredi 26 janvier 2011, de la création d’une nouvelle coalition de partis politiques, l’Alliance pour la Réconciliation Nationale (ARN) vient relancer le débat sur la moralisation de la vie politique.

Tous ceux qui avaient perdu confiance en nos leaders politiques actuels et qui souhaitaient un rajeunissement de la classe politique ont été ainsi confortés dans leur conviction.

En tant qu’observateurs neutres, nous pouvons relever que le socle de cette alliance interpelle sérieusement sur l’éthique qui gouverne le comportement et le cheminement des partis politiques nigériens. Il apparaît que ce socle s’est construit sur deux critères évidents : (i) une volonté de contourner l’arrêt de la Cour Constitutionnelle quant à l’invalidation des listes électorales non-conformes à la constitution et au code électoral ; (ii) un calcul électoral opportuniste, sans proximité objective des projets politiques ou des idéologies, sur la seule base des probabilités fictives d’arriver au pouvoir.

Ces constats sont flagrants et tranchants, et l’honnêteté intellectuelle nous commande de les relever dans toute leur gravité. Il en vient qu’il y’a peu ou pas d’éthique dans une grande partie de la classe politique nigérienne. Les mêmes fautes reviennent : violation ou cautionnement de violation de la constitution et du serment donnée ; et logique égoïste de partage de postes.

Un des grands partis politiques (le PNDS), s’est mis à l’écart de cette position ambiguë. Ce parti n’est pas, non plus, vierge de toute erreur dans le passé. Nous ne saurons dire s’il s’agit ici de stratégie politique qu’il fait en sa propre faveur (ce que clament ses opposants) ou s’il s’agit d’une réelle prise de conscience et d’un nouvel engagement pour le respect de la constitution.

Il demeure que le débat sur l’éthique en politique et le respect de la constitution est loin d’être réglé au Niger.

 

Les nigériens doivent rester vigilants, et suivre avec exigence et lucidité le déroulement de cette affaire. Nous devons questionner nos leaders (des deux camps opposés), et  voir plus loin que l’évènement actuel (celui du débat sur l’arrêt de la cour constitutionnelle et de la tenue des élections). Nos choix doivent être exigeants : il faut réclamer à la classe politique (dans son ensemble) plus d’éthique ; il faut exiger d’elle une orientation claire et des programmes lisibles et vraiment originaux ; il faut exiger d’elle qu’elle arrête de jouer avec nos destins, nos consciences et nos biens. Car l’Etat, ses biens, et le pouvoir, ne sont que le bien du peuple.

 

Le scandale de la classe politique laisse beaucoup de nigériens perplexes, jusqu’à la tentation de s’abstenir du vote. Ce n’est pas sans raison. Disons le néanmoins sans ambages : l’abstention n’est pas la solution. D’une part, elle est de nulle effet, jusqu’au jour où un quorum de participation sera requis  pour valider les scrutins. D’autre part, le non choix est en soi un choix. Ne laissons pas aux autres le choix de choisir pour nous. Malgré la confusion qui règne, chaque nigérien doit voter, en se basant sur sa propre conscience, et en dépassant lui-même ses propres tentations d’immoralité. Car les électeurs sont aussi responsables : voter pour un proche (juste car il est tel), voter pour un cadeau reçu, ou voter en visant un poste, un avantage….tout ceci est une dérive NATIONALE. Nous disons aux Nigériens, dans leur ensemble : il faut mettre fin à cette dérive collective. Nous sommes responsables, tous responsables !

 

Demain, à l’heure de ce rendez-vous crucial, l’électeur aura le choix entre dix (10) candidats, une femme et neuf hommes ; des candidats, pour la plupart, routiniers de l’espace politique Nigérien. Cette élection dégage une désagréable impression de déjà vu et la hantise de l’éternel retour. Lorsque viennent s’y ajouter des alignements politiques tardifs et illisibles, la confusion de l’électeur est totale.

Cependant, ne nous y trompons pas, chers concitoyens : ces élections, sans être celles de la dernière chance, doivent être celles de la maturité et de la mémoire. Chers concitoyens, dans l’isoloir, n’oublions pas. N’oublions pas l’instabilité politique symbolisée par trois coups d’Etat militaires et 5 changements de République en 20 ans. N’oublions pas le trop faible développement humain caractérisé par une présence prolongée en queue de peloton de l’Indice de Développement Humain (IDH). N’oublions pas les famines, l’analphabétisme… En un mot n’oublions pas que nous votons pour que notre pays change en bien, pour notre avenir et celui de nos enfants. Souvenons-nous que « l’homme de l’avenir est celui qui a la mémoire la plus longue » (Nietzsche).

 

Le peuple Nigérien a besoin d’un nouveau départ, d’une révolution des mentalités et de dirigeants à son service, et non pas au service de leurs propres égoïsmes. La nouvelle décennie qui commence, avec son vent de liberté qui souffle sur l’Afrique du Nord renforcera sans doute l’ancrage de la démocratie dans les pays au Sud du Sahara.

Le Niger pourra aussi faire sa révolution dans les urnes, le lundi 31 janvier 2011.

 

Réaffirmons-le : Cri de Cigogne n’a ni candidat ni parti politique.

 

Notre unique consigne : prenez votre résolution, et allez voter.

Que Dieu bénisse le Niger.

  • 1. Voir notre dossier complet consacré à la réflexion sur les perspectives post transition.

Commentaires

Avis perso: Appel aux Nigériens, à la veille des élections

Partageant la même opinion que ce groupe de réflexion, en ce qui concerne l'avenir de notre cher pays,je pense que voter ou ne pas voter aujourd'hui vu la la mentalité et la quasi absence du patriotisme de la majeur partie des nigériens ne changera en aucun cas l'avenir de ce pays dans les cinq prochaines années. Ceci n'est pas un pessimisme encore moins de la démission, c'est vraiment la réalité du pays. j'appelle donc l'ensemble de nigériens aspirant à un changement de mentalité à faire leur choix dans l'objectivité car tout ce qui adviendra dans les prochaines décennies,engage notre responsabilité. Suggestion: J'aurais souhaiter que vos articles puissent un jour paraitre dans les journaux nationaux.Puisque une grande partie des intellectuelles n'a pas accès aux docs électroniques.

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